jeudi 21 avril 2011

Coop santé d'Aylmer: Des membres hésitent à renouveler leur adhésion

Radio-Canada - 21 avril 2011
Une cinquantaine de membres de la Coopérative de santé d'Aylmer ont fait savoir, lors d'une rencontre mercredi soir, qu'ils songent à ne pas renouveler leur adhésion. Cette décision fait suite à l'annonce du départ d'un quatrième médecin depuis le mois de décembre. Lire la suite.

samedi 16 avril 2011

Les démons des coopératives de santé

Louise-Maude Rioux Soucy   Le Devoir, 16 avril 2011 

La solidarité des débuts est empoisonnée par la logique de marché
Auréolée d'une approche sociale et solidaire, la coopérative de santé est confrontée à des démons qui vont au-delà de l'accessibilité universelle aux soins. Les mécanismes implacables d'attraction de la main-d'œuvre médicale la livrent en effet aux règles du marché et à la surenchère. Un mélange qui suscite bien des questions, mais peu de réponses.

Entreprise à but lucratif ou service essentiel, la coopérative de santé? Le litige entourant son financement par des municipalités a remis cette épineuse interrogation au goût du jour cette semaine. La question est fondamentale puisqu'elle déterminera les limites légales d'un modèle d'affaires qui se cherche encore et qui, ce faisant, prête de plus en plus flanc à la critique.

Il ne faut pas se leurrer, si les coopératives ont connu un essor aussi important — plus d'une cinquantaine en 15 ans —, c'est d'abord parce que le contexte québécois leur est favorable, explique la juriste spécialisée en santé Marie-Claude Prémont. «Le moteur qui est derrière tout ça, c'est le médecin qui veut accroître ses revenus, pas l'accessibilité aux soins. Les coopératives de santé sont le fruit de comportements d'affaires de la part de médecins qui essaient de trouver des formules pour profiter d'une certaine pénurie de ressources.»

La solidarité des débuts est effectivement de plus en plus ébranlée par la compétition qui va croissant avec la pénurie de médecins de famille. C'est ainsi que des municipalités ont franchi le pas qui a plongé Québec dans l'embarras en finançant des coops même si la loi précise que cela ne fait pas partie de leurs compétences. «Les municipalités ne sont pas à blâmer, croit Mme Prémont. Elles sont confrontées à un jeu commercial qui se joue au-dessus de leur tête. Elles ont des populations vulnérables qui réclament une solution de remplacement à la solution publique qui ne fonctionne pas.»

Née de la volonté populaire, la coopérative de santé permet en effet aux petites et moyennes communautés d'accéder à des services médicaux près de chez elles. «La Loi sur la santé garantit l'accessibilité aux soins; ce qu'elle ne prévoit pas, en revanche, c'est la proximité. La coop est un bon moyen de consolider ou de proposer un service de proximité», résume Benoit Caron, directeur général de la Fédération des coopératives de services à domicile et de santé du Québec (FCSDSQ).

Cette proximité est bien souvent vitale pour la santé d'une municipalité en raison de son puissant pouvoir d'attraction et de rétention. Le problème, c'est que les coopératives sont considérées comme des entreprises privées individuelles ou à capital-actions dans leurs relations avec ces mêmes municipalités, note Marie-Joëlle Brassard, directrice de la recherche et du développement au Conseil québécois de la coopération et de la mutualité.

Or, toute la société québécoise est organisée en fonction du lucratif et du non-lucratif, explique Mme Brassard. «Dans les ministères, spécialement au Revenu, on conçoit toujours les politiques et les programmes en fonction de cette logique binaire opposée.» Pour la coopérative, qui cherche d'abord à répondre à un besoin, mais ne renie pas le profit, la position est tout simplement intenable.

La boîte de Pandore

C'est cette double identité qui est au coeur du litige qui oppose la municipalité de Yamaska à la Coopérative de solidarité santé Shooner-Jauvin de la municipalité voisine de Pierreville. En 2009, huit citoyens de Yamaska ont déposé une plainte au ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire (MAMROT). Ceux-ci reprochaient à leur municipalité de s'être engagée à débourser 18 000 $ par année pendant cinq ans pour financer la coop, financement que la loi interdit. La direction régionale de la Montérégie leur ayant donné raison, la municipalité de Yamaska a décidé de retirer ses billes, au grand dam de la coopérative qui a fait appel à ses avocats-conseils. Québec a eu vent de l'affaire, une réflexion conjointe a même été entreprise par le MARMOT conjointement avec le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), mais un an plus tard, rien n'a encore filtré de ces échanges.

Sur le terrain, ce flou entretient la division. D'un côté, il y a ceux qui s'en tiennent à la loi, qui précise qu'une municipalité ne peut agir que selon ses compétences, ce qui exclut le financement ou la subvention d'un établissement commercial, catégorie dans laquelle le MARMOT range la coopérative. De l'autre, des voix font valoir que la nature même des coopératives de santé — qui offrent un service de proximité jugé essentiel — leur confère un statut particulier. Ceux-ci évoquent souvent les articles 91 et 101 de la Loi sur les compétences municipales, qui prévoit qu'une municipalité ou une MRC peut accorder une aide financière pour l'exploitation d'un établissement de santé. Maintenant, une coopérative peut-elle être considérée comme un établissement de santé? C'est loin d'être acquis, note Marie-Claude Prémont dans un texte cosigné par le Dr Réjean Hébert, doyen de la Faculté de médecine de l'Université de Sherbrooke.

Ce n'est là qu'un des écueils décrits par les deux experts dans ce texte éclairant paru en novembre dernier dans La Revue juridique Thémis. Certaines des stratégies retenues pour attirer les médecins soulèvent en effet d'importants questionnements éthiques autant que déontologiques. Au premier chef, celle qui consiste à offrir un loyer gratuit ou au rabais et un soutien administratif à des médecins qui comptent déjà sur une rémunération majorée de 35 % pour couvrir leurs frais d'exploitation.

La loi est pourtant claire: le médecin ne peut exiger et recevoir, pour un service assuré, que la rémunération prévue à l'entente. Tout financement supplémentaire est contraire à la loi. «Si on veut garder la formule des coopératives, ajustons alors la rémunération», propose Mme Prémont, qui est aussi professeure titulaire à l'École nationale de l'administration publique (ENAP). Jusqu'ici, ni le gouvernement ni la Régie de l'assurance maladie du Québec n'ont voulu ouvrir cette boîte de Pandore, préférant s'en remettre au Collège des médecins du Québec.

Ce dernier, dans une mise au point datée de 2008, explique que la prohibition en matière de locaux gratuits ou au rabais n'est pas une règle absolue. Il précise qu'un médecin peut continuer à bénéficier d'un tel avantage s'il exerce dans une région en pénurie ou soumise à des conditions socioéconomiques particulières. Pile-poil là où les coopératives sont devenues une nécessité.

De la gratuité à la solidarité

L'autre bête noire des coopératives est le paiement d'une part sociale et d'une cotisation annuelle qui peut se heurter au principe de la gratuité des soins. Trois coopératives font d'ailleurs l'objet d'une enquête de la RAMQ à ce sujet. Elles sont toutes soupçonnées d'avoir exigé le paiement d'une cotisation pour avoir accès aux médecins. Ce que la loi interdit formellement.

Le dilemme est cornélien. Comment répondre aux besoins et aux désirs des membres d'une coopérative dans un réseau public de santé qui, en garantissant l'universalité des soins, prohibe les privilèges? «C'est une réalité des coopératives de santé avec laquelle elles doivent composer, répond Benoît Caron. Elles doivent travailler sur la promotion de la solidarité pour assurer la proximité des services, par le biais de la cotisation annuelle notamment, mais elles ne peuvent en aucun cas l'exiger.»

Cette règle n'est pas sans causer des frictions, spécialement quand plusieurs municipalités sont concernées et que l'une d'elles décide de retirer son financement, comme c'est arrivé à la Coop Shooner-Jauvin. «C'est nous qui payons la bâtisse, mais nous ne pouvons pas empêcher qui que ce soit d'y avoir accès», confirme son président, André Descôteaux. Ce qui ne plaît pas à tous, poursuit celui qui est aussi maire de Pierreville. «Il y en a qui trouvent ça "cheap" en maudit. Il me semble que c'est gênant d'aller au buffet d'une réception quand tu n'as pas payé ton billet.»

Avec toutes ces zones grises, ils sont de plus en plus nombreux au Québec à réclamer des règles plus strictes, voire carrément un encadrement législatif. Mais selon la FCSDSQ, légiférer n'est pas nécessaire puisque trois mécanismes veillent déjà au grain: la Loi sur les coopératives, le Collège des médecins et la Loi canadienne sur la santé. «Il ne faut pas ajouter des lois, mais faire respecter les lois», conclut Benoit Caron.

lundi 11 avril 2011

Coops de santé: Québec dans l'embarras

Le financement provenant de municipalités est au coeur d'un litige que personne n'ose trancher.


Le Devoir, Louise-Maude Rioux Soucy   11 avril 2011

Le modèle coopératif en santé a du plomb dans l'aile. Déjà, trois coopératives sont dans le collimateur de la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ). Au moins une autre, la Coopérative de solidarité santé Shooner-Jauvin, financée en bonne partie par dix municipalités, a fait l'objet d'une plainte au ministère des Affaires municipales, Régions et Occupation du territoire (MAMROT), a appris Le Devoir. Un dossier chaud qui embête aussi le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Lire la suite